Le Tyrol est un pays de montagne les plus beaux et les plus pittoresques. Non seulement les chasseurs de chamois, à l’exemple de l’empereur d’Autriche, s’y livrent à leur passion favorite, mais les excursionnistes de l’Europe entière s’y donnent rendez-vous pour admirer la beauté sauvage de ses sites et retrouver, chez les habitants, un peu des costumes anciens et des habitudes du passé.
 
Mais une catastrophe, aussi imprévue que terrible, vient de jeter l’épouvante dans toute la région située au nord de ce pays. Dans les Alpes de Goriach, près d’Innsbruck, se trouve une vallée délicieuse, où les paysans d’alentour font paître leurs troupeaux.
Dernièrement, sans que rien ne pût faire craindre un pareil évènement, une immense masse de rocher s’est détachée des flancs de la montagne a glissé le long des pentes et est venue, avec un bruit formidable, s’écraser dans le fond de la vallée. Cette avalanche de terres et de pierres mesurait 140mètres de longueurs et 35 mètres de largeur.
 Des pâtres, qui se trouvaient là, ont pu s’enfuir à temps, mais un grand nombre de leurs bestiaux, à été surpris par l’éboulement. Six touristes allemands, qui se promenaient le long d’un ruisseau, dans la vallée, voyant qu’il était trop tard pour s’enfuir, se couchèrent dans le lit de ce ruisseau, presque à sec, à cette époque. L’énorme bloc passa, au-dessus de la rivière sans les atteindre, et ils en furent quittes, fort heureusement, pour la peur.
On ne sait encore à qu’elle raison attribuer cette catastrophe, mais il convient de signaler en général comme étant la cause de presque tous les éboulements de cette sorte, le déboisement à outrance que l’on pratique, un peu partout, de nos jours. En effet, les racines des arbres fixent les terres meubles et, d’autre part, arrêtent les infiltrations d’eau. Ce sont ces infiltrations qui, peu à peu désagrègent les terrains et minent la base des rochers, sur le flanc des montagnes.
Ayant compris la faute commise, on lutte maintenant avec énergie contre le déboisement. Malheureusement, il est parfois difficile de réagir contre l’habitude néfaste que l’on a de faire disparaître bois et forêts. Tous les pays devraient suivre l’exemple de l’Autriche, où une loi défend de couper un arbre si, auparavant, on n’a pas eu soin d’en planter deux.
 
Article et gravure relevés dans le petit journal illustré du 5 aout 1906.