../pages/belepoque.html
Suicide extraordinaire
(Laval 1908)



Résolu d’en finir avec la vie, un homme se livre aux lions d’une ménagerie.
Un suicide tout à fait singulier a eu lieu ces jours derniers à Laval, dans une ménagerie installée à la foire de l’Angevine.

Un employé du cinématographe Giuili Glasner, le nommé Jean Grollier, âgé de dix neuf ans, était épris depuis un certains temps d’une jeune fille de forains et jamais, malgré ses vives instances, il n’avait pu obtenir une parole d’encouragement.

Désespérer, il prit une résolution suprême et, pour quitter l’existence, il eut recours à un mode de suicide digne des excentriques américains.

Peu de temps auparavant, il avait été employé dans la ménagerie du dompteur Ahmed-ben-Amar-ben-el-Gaïd, avec lequel d’ailleurs, il était resté en bon termes ; il profita de ces circonstances pour entrer dans la baraque où, comme il était connu, on le laissa aller et venir sans lui adresser la moindre observation. Au moment où il savait qu’on ne le regardait pas, Grollier entra dans la cage aux lions et verrouilla la porte derrière lui pour ne pas être dérangé. Un des fauves sauta sur lui aussitôt et lui ouvrit la gorge d’un coup de dent, après lui avoir labouré la poitrine et les épaules avec ses griffes.

Aux cris que poussa Grollier, le dompteur Ahmed et le personnel d’une baraque de lutteurs vinrent pour dégager le désespéré, mais il était trop tard.
Dans une des poches du mort, on a trouvé une lettre de supplications et une lettre d’adieux que Grollier avait adressées à celle qu’il aimait.

Le petit journal a rappelé, à ce propos que l’idée de se faire mourir en se donnant en pâture aux lions a déjà été mise en pratique par quelques déséquilibrés. On se souvient notamment qu’un milliardaire américain, beau-frère d’Harry Taw, le héros du drame de Madison-Square, s’était fait dévorer par quatre lions de l’Atlas, sous les yeux terrifiés de quelques amis qu’il avait conviés à un banquet d’adieux.
 

 
Article et gravure relevés dans le petit journal illustré du 27 septembre 1908.





Retour aux articles