Maurice Linet,dénoncé,déporté,disparu (Fors,1944) |
Son nom ne figure sur
aucun monument aux morts. Maurice Linet a pourtant été résistant
dès 1941. En 1944, il est déporté dans un camp de concentration. Sa
sœurs, Yvonne Moinier,
82 ans, longtemps forsitaine, elle-même résistante, comme son père et
son mari, se bat depuis 60 ans pour cette reconnaissance.
Maurice Linet est né un 6 juin, à Poitiers, où habitaient ses parents. Jeune homme généreux, jovial, artiste («il avait un bon coup de crayon»), sportif («il aimait la boxe»), il avait des airs de Marcel Cerdan avec son nez cassé lors d’un accident d’enfance. Dès le 1er mai 1941, Maurice Linet, alors peintre chez un patron, rejoint à 20 ans le réseau Louis Renard, juste créé, et qui sera le premier réseau de résistance de la Vienne. Ce réseau noyaute les administrations, organise des réceptions de parachutages et des filières de passage et édite un journal, «Le libre Poitou» Mais une imprudence entraîne son démantèlement à partir de 1942. Un paquet, avec des documents compromettants est en effet adressé à un contact niortais. Mais un employé trop zélé de la poste, intrigué par un détail, en réfère à son directeur qui transmet au préfet, lequel informe Poitiers. La Gestapo, avec le concours de la police de Vichy, arrêta ainsi plus de cent membres du réseau. Maurice Linet réussira à s’échapper et se réfugiera en 1943 à Fors, chez un Tabault, dont la belle-sœur était la marraine d’Yvonne Moinier. Maurice Linet y restera quelque temps, jusqu’à ce qu’une dénonciation arrive à la gendarmerie de Prahecq. Mais un gendarme avertira «qu’il file rapidement car il devrait être arrêté dans la nuit». Le dénonciateur avait pensé qu’il s’agissait d’un réfractaire au service du travail obligatoire en Allemagne… Disparu au camp d’Ebensee. Reparti dans la
Vienne, près de Neuville, il sera de nouveau dénoncé et arrêté, le 24
mars 1944, alors qu’il travaillait dans un champ, en même temps que
d’autres, dont Pierre Ropiquet,
niortais qui survivra à la déportation. Maurice Linet sera détenu à la prison
de la Pierre-Levée, à Poitiers. «La dernière fois que je l’ai vu, se
souvient Yvonne Moinier,
sa tête avait doublé de grosseur…»
Maurice Linet sera déporté à Ebensee, en Autriche, un camp de concentration annexe de Mauthausen. Ce camp d’Ebensee, qui faisait travailler les déportés dans une usine souterraine, enregistrait 350 morts par jour en avril 1945. C’est là que disparaitra Maurice Linet le 24 avril 1945, quelques jours avant la libération du camp par les américains. Un camp dont la fosse commune comptait 3.500 victimes. Maurice Linet sera d’abord reconnu mort en déportation jusqu’à ce qu’un courrier mystérieux d’un espagnol assure avoir rencontré Maurice Linet en Russie. Yvonne Moiner tentera de multiples recherches, par la Croix-Rouge, ou même l’émission télévisée «perdu de vue», mais en vain. Authentique résistant, Maurice Linet reste disparu… Cor. Guy Brangier.
Article relevé dans la Nouvelle République du 27 février 2006. |
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