Le drame de Saint Ouen (1906) |
Effroyable vengeance d’une domestique congédiée.
L’idée de ce crime atroce, froidement conçu par une femme, est née d’un violent désir de violence. M. Royer, célibataire, demeurant à Saint Ouen, avec son neveu, André Thibault, âgé de douze ans, avait une domestique, Julie Padoux, âgée de cinquante ans. S’étant avisé que sa ménagère faisait danser un peu trop effrontément l’anse du panier, il la congédia. Mais la femme, avant de partir, jura de se venger. Et elle employa à exécuter son projet criminel la dernière nuit qu’elle devait passer sous le toit de son maître. Vers dix heures du soir, M. Royer se coucha avec son neveu, dans le même lit, comme il en avait l’habitude. Le petit cabinet réservé à Mme Padoux se trouvait séparé de la chambre qu’occupaient M. Royer et son neveu par la salle à manger. Tout dormait dans la maison ; seule, Mme Padoux veillait. Il était minuit ; c’était le moment qu’elle avait choisi pour mettre son projet à exécution. Elle se leva doucement, chaussée d’espadrilles pour amortir le bruit, et elle se rendit dans la cuisine. Elle alluma une bougie et versa de l’essence minérale dans une casserole. A pas de loup, la domestique entra dans la chambre où dormaient paisiblement l’oncle et le neveu. Doucement, elle répandit sur le lit l’essence en imprégna les oreillers, les couvertures, puis elle y mit le feu. En un clin d’œil, le lit fut en flammes. Le crépitement, les premières atteintes de la douleur, éveillèrent M. Royer et le jeune André Thibault. M. Royer put entrevoir la silhouette de sa domestique qui, penchée sur le jeune André Thibault, lui maintenir les mains et les pieds au risque de se brûler elle-même, afin que le pauvre enfant fût plus cruellement atteint et ne pût se sauver. Il se jeta comme un fou sur la criminelle à laquelle, au milieu des flammes, il tenta d’arracher sa proie. Il lutta quelques instants, mais la douleur lui fît lâcher prise ainsi qu’à l’incendiaire qui, elle aussi, avait dû être profondément brûlée aux mains et au visage. Elle s’enfuit alors fermant derrière elle la porte à double tour. Sa vengeance était assouvie !... Aux cris des victimes, les voisins accoururent, enfoncèrent la porte, M. Royer et son neveu, cruellement brulés, furent emportés à l’hôpital. Quant à Julie Padoux, poussée par le remords ou la crainte du châtiment, elle était allée tout droit se jeter dans le canal de Saint Denis. Le matin même, on y retrouvait son corps. La criminelle s’était fait justice. Article et gravure relevés dans le petit journal illustré du 22 avril 1906. |
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