Le crime de Lagon
(1907)



Branchery et Parrot étrangle M. Monget dans la cave du café de la gare. 
Ce café de la gare de Langon, tenu par les époux Branchery, était une véritable caverne de brigands. A présent que le meurtre de M Monget a attiré sur ses hôtes l’attention et les curiosités de la justice, on commence à voir se dessiner le rôle tenu par chacun des affiliés de la bande sinistre qui tenait là ses sanglantes assises.

Le chef incontesté était ce Branchery, tenancier de l’auberge type de bellâtre robuste et paresseux. Il tenait là une sorte d’école professionnelle pour cambrioleurs et assassins; il enseignait à ses disciples l’art de crocheter une serrure, d’enfoncer une porte et de faire aux patients les coups de la cravate et du père François. Il se tenait au courant des progrès de la science spéciale qu’il enseignait, et donnait même des leçons de jiu-jitsu.

Sa femme, Lucia, l’aidait dans ses entreprises, et, parmi ses fidèles acolytes, il comptait Parrot, son garçon de salle, un gaillard violent et déterminé, habitué à obéir aveuglément au patron, et les frères Gazol, contrebandiers de leur état.

Voilà dans quel milieu M. Monget, le malheureux agent d’assurances, vint échouer. Attiré par les charmes de Lucia Branchery, il fut d’abord frappé d’un coup de marteau par Parrot qui le rata, puis par Branchery qui l’assomma à demi. Leur coup fait, les deux bandits descendirent l’homme dans la cave, et là, ils l’achevèrent en l’étranglant à l’aide d’une corde dont ils tenaient les deux extrémités Monget mort, ils requirent l’aide de Gazol et se débarrassèrent du cadavre en le jetant dans la Garonne.

On sait que les révélations d’Henriette Courèges, la servante des Branchery, on amené l’arrestation des assassins.
Les propos de ceux-ci devant le juge d’instruction sont des plus typiques et montrent bien quel est l’état d’esprit de ces misérables. Ils ne s’émeuvent pas d’autrement à l’idée du châtiment qui leur est réservé.

Parrot, ayant avoué, fut confronté avec Branchery qui refusait encore de parler.
« -Bah ! mon vieil Eugène, lui dit-il d’un ton cynique, crache tout, va ! Nous en serons quittes pour aller voir le pays des singes… On ne guillotine plus !... »
« On ne guillotine plus !... » Voilà la grande raison des bandits ; voilà la cause de cette recrudescence de crimes ; voilà le secret de tant de cynisme !... On ne guillotine plus, se disent les assassins… A quoi bon nous gêner ?... Nous pouvons assassiner, on ne nous tuera plus.

Et nos humanitaires à tous crins auront encore, après cela, l’aplomb de proclamer l’inutilité et l’immortalité de la peine de mort !
 
Article et gravure relevés dans le petit journal illustré du 14 avril 1907.




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