Un zeppelin sombre dans la mer du nord (1916) |
---|
Il revenait d’un raid sur l’Angleterre il revenait tout guilleret, car il avait tué nombre de femmes, d’enfants et de vieillards. Même en route, par dessus la mer il se débarrassait joyeusement des bombes qui lui restaient, et les jetait instinctivement sur tous les navires qu’il rencontrait, sans même s’inquiéter de leur nationalité. Il s’en allait donc tout guilleret vers les côtes d’Allemagne. Mais que lui advint-il soudain ?… Est-il vrai que passant à faible hauteur au-dessus d’une île hollandaise, il ait reçu quelques pruneaux des soldats qui gardaient cette île. Ou bien une avarie inattendue se produisit-elle spontanément dans son énorme carcasse ? Toujours est-il qu’il se mit à descendre, à descendre et que bientôt il rasa les flots. Les hommes qui le montaient essayèrent de retenir avec des cordes les flancs métalliques du géant qui menaçait de s’entrouvrir. Peine perdu ! Les ballonnets intérieurs se vidaient, le Zeppelin descendais toujours. Bientôt, ses nacelles furent submergées. L’équipage se réfugia sur la plate-forme supérieur du ballon. Alors, au lointain apparut un tout petit navire, un modeste chalutier anglais du genre de ceux que le Zeppelin s’était amusé à envoyer au fond de l’eau à coups de bombes, au cours de sa croisières nocturne. Le jour s’était levé; ont fit des signaux on cria. Le chalutier s’était approché, s’était le King Stephen du port de Grimsby. Le patron du chalutier anglais, M. William Martin, raconte que, lors de la rencontre, une quarantaine de mètres de la carcasse flottait encore, dominant l’eau d’une hauteur de dix mètres. Une quinzaine d’hommes se voyaient dans la nacelle du haut de l’appareil mais l’équipage était plus nombreux. - »Envoyez nous une embarcation, cria un des naufragés, qui paraissait être un officier de marine: je vous donnerai cinq livres ! M. William Martin réfléchit que les allemands étaient une trentaine qu’ils étaient armés et que lui n’avait à son bord que neuf hommes et un seul pistolet. Le sauvetage lui parut dangereux. A supposer que je vous prenne , dit-il, que vous nous jetiez par-dessus bord et que vous dirigiez le chalutier vers l’Allemagne, cela vous ferait beaucoup d’honneur, mais cela ne nous rapporterait guère à nous ! L’officier protesta que ni lui ni ses hommes ne feraient rien de semblable. Mais le patron anglais se souvint de ce qu’avaient fait les huns et de ce qu’ils pourraient faire encore. Il ne se laissa pas convaincre d’exposer son équipage et lui-même à un tel danger. « Je m’écartai donc du Zeppelin vers neuf heures trente du matin, déclara-t-il. Le capitaine me dit qu’ils coulaient. Quelques allemands me crièrent tout d’abord : « Sauvez-nous ! » Puis ils montrèrent leurs poings dès qu’ils s’aperçurent que cela n’avait aucun effet. Je les aurais bien sauvés, n’eut été la raison que j’ai dite. « Je partis à la recherche d’une canonnière ou d’un vaisseau patrouilleur mieux aménagé pour surveiller un équipage ennemi. En temps de paix, évidemment, j’aurais pris tous les allemands à mon bord en deux temps et deux mouvements… » De cette aventure, le peuple boche pourra tirer une moralité. C’est à savoir que si le patron du chalutier anglais a refusé de sauver l’équipage du Zeppelin, la faute en est à la réputation de cruauté et de félonie que les allemands se sont crée depuis le début de la guerre. Et les Boches, cette fois, furent punis par où ils avaient pêché. Article et gravure relevés dans le petit journal illustré du 27 février 1916 |
Retour aux articles |